1929 Great Depression Cold Case 10 : 1924. Highway to Hell

10/11/2020

il y a quelque chose d'excessivement curieux dans le monde actuellement : Il semble de plus en plus compliqué de pouvoir remonter aux causes des phénomènes que nous vivons. Dans un monde qui se complexifie cela n'a rien d'étonnant j'en conviens, pourtant ce qui frappe  c'est la démarche intellectuelle qui semble mélanger causes et conséquences.

Prenez le virus, on tente de traiter les conséquences mais les causes elles sont masquées (si vous me permettez l'expression) , du coté de l'économie c'est encore pire : le virus a bon dos d'être la source de nos soucis.

Sans causes il est pourtant difficile d'établir un quelconque diagnostic, et sans diagnostic encore moins simple de trouver une éventuelle solution . Et ainsi va le bateau ivre de la confusion entre conséquences et causes qui nous mène droit au triangle des bermudes de l'expression d'opinion. Tout le monde en ayant une , peut et s'exprime un peu sur tout , mais tout le monde s'y perd.


Du coté économique pourtant la crise de 2007-2008 avait accouché d'un remède : Le Quantitative Easing (assouplissement quantitatif). Nous y sommes encore et pas prés d'en sortir, comme dans le dit triangle précité ci dessus . On peut pourtant commencer à se poser la question , pour les plus téméraires d'entre nous et pour ceux et celles qui pensent encore , de savoir si ce remède ne serait ce pas en fait le poison. Dans un article de ce blog Le mal ou le remède ? : telle est la question ! j'avais posé clairement la question en utilisant quelques éléments historiques pour étayer le raisonnement.

Par la suite dans un autre article 1929 ou 1931 ??? vous avez pourtant le choix dans la date j'avais tenté d'attirer l'attention sur le fait que le troublant se mélangeait avec le bizarre et le mystérieux chez nos banquiers centraux.

Lorsque celui par lequel était arrivé le remède , le nommé Ben Bernanke (le gouverneur de la Fed pendant la crise de 2007-2008) , grand connaisseur de la grande dépression , utilisait un pseudo pendant la crise de 2007-2008, nous étions dans le bizarre. Lorsque de plus le pseudo utilisé était : « Edward Quince » et que l'anagramme de ce pseudo était QE INDUCED WAR , nous étions dans l'étrange et le mystérieux.

Dans l'article 1929 Great Depression Cold Case 8 : 1922- 1923 Norman s'impose petit à petit j'avais mis en évidence que les politiques d'open market , dont le QE est le digne héritier
avaient été découvertes un peu par hasard en 1922 aux USA. 


En 1924 cependant l'heure n'était plus aux balbutiements mais à l'action. La politique « d'argent facile » de 1924 fût d'une importance historique capitale. Elle fût la premiere politique d'ampleur prise de façon délibérée par la Fed en ayant pour but de combattre une chute des prix et de l'activité commerciale mais aussi pour encourager les flux de capitaux internationaux.

C'est bien évidemment Benjamin Strong (le gouverneur de la Fed de New York) qui coordonna cette politique. Cf 1929, Great Depression Cold Case 4 : Coopération ou compétition telle est la question ?. Mais pourquoi Strong était il si intéréssé par la reconstruction internationale ??

En partie c'était parce qu'il possédait une vision altruiste certaine , en particulier pour le bien être des populations des pays étrangers. Ses visites nombreuses en Europe post guerre lui avaient appris de façon prégnante les difficultés rencontrées par les populations Européennes. Mais tout altruiste qu'il était , Strong était avant tout Américain et il pensait sincèrement que c'était dans l'intérêt des USA. Cet intérêt Americain pouvait se résumer en 2 points :

1 La restauration du gold standard dans les pays étrangers permettrait de stopper les  flux d'or qui se dirigeaient tous vers les USA. Cela permettrait par conséquent de stopper la menace de l'inflation galopante qui s'ensuivait et mettrait en terme aux politiques monétaires discrétionnaires qui devaient être utilisées. En un mot cela permettait de revenir au vrai gold standard. . 

2 Les exportations Américaines seraient encouragées par la stabilité des taux de change , de plus grand flux de prêts internationaux, et la récupération de revenus et de pouvoir d'achat à l'étranger.

A cette époque les exports principaux US étaient les produits issus de l'agriculture , le plus important d'entre eux le coton et la plupart du coton partait pour ... L'Angleterre. Autant donc que les taux de change des importateurs des produits Américains ne se déprécient pas plus que de raison. Mais seule cette démarche n'était pas suffisante , il fallait que le problême des dettes intergouvernementale soit résolu. (Lester V Chandler Benjamin Strong Central Banker p 266-271).

Du coté Français , Poincaré le président du conseil qui avait été l'instigateur de l'invasion de la Ruhr croyait voir les planètes s'aligner en sa faveur .


 Il avait en effet deux objectifs qui justifiaient selon lui cette manœuvre . Le premier une preuve claire de la volonté Allemande de payer les réparations dans le futur et le second , dans le cas où un accord Americano Britannique ne serait pas scellé afin de réduire de manière drastique les dettes inter gouvernementales , le minimum d'un engagement Britannique de supporter le régime existant des réparations.

Le 23 Septembre 1923 le 1er objectif était atteint quand le gouvernement Allemand de Stresemann mis fin à la résistance passive, le second était en vue car l'activité diplomatique Americano Britannique semblait battre son plein. Pourtant certains commentateurs avisés sentaient un vent mauvais pour la France derrière la débauche d'activité en particulier Jacques Seydoux. Ils avaient raison.

Les experts qui se rencontrèrent à Paris le 13 Janvier 1924 élirent Reginald Mc Kenna pour présider le second comité chargé de définir les moyens d'induire le rapatriement du capital Allemand exporté , Charles Dawes celui de présider le premier comité (le plus important) qui avait pour objectif de ramener le budget Allemand à l'équilibre et de stabiliser sa monnaie.

Charles Dawes était un banquier Americain qui par la suite sera nommé Vice président des USA (1924-1929) et qui se verra même décerner le prix Nobel de la paix en 1925 pour les accomplissements du plan qui porte son nom : Le fameux plan Dawes.

Ce plan avait pour but de contribuer à la réorganisaton des finances allemandes, avec l'aide de prêts américains, dans le but d'éviter l'effondrement immédiat de l'économie européenne. Les personnalités jouèrent comme de bien souvent un rôle prépondérant sur le déroulé des événements. Dawes exprima de prime abord des sentiments pro Français assez marqués mais son Adjoint Owen Young et l'expert Britannique , Sir Josiah Stamp assisté d'Arthur Salter dominèrent le comité depuis le début. Or en coulisse , et alors que Poincaré avait stipulé son opposition , ils réouvrèrent bien vite la question des niveaux futurs des paiements des réparations.

En Avril 1924 parmi les recommendations principales il y avait :

  • la réduction des paiements des réparations en 1924-1925 à 1 milliard de marks / an avec augmentation progressive des paiements jusqu'en 1928-1929 . Date à laquelle les paiements annuels seraient de 2,5 milliards de marks avec une indexation de ces montants (à la hausse) sur un indice de prospérité de l'économie Allemande.
  • L'introduction d'une clause de sauvegarde de transfert : les paiements ne pourraient pas mettre en danger la stabilité du mark , c'était la pierre angulaire du plan
  • Un prêt international de 800 milliards de marks or (40 millions de £ ) afin de procurer des réserves pour la nouvelle banque Allemande d'émission et d'aider à financer les paiement initiaux des réparations
  • L'abandon de toutes les sanctions , les gages Productifs de Poincaré , afin de permettre la viabilité du plan.

Poincaré était bien loin de ce qu'il escomptait, du coté Anglais on était pas ravi non plus et ce alors que la désillusion Française était grande . Les Autorités Anglaises pensaient que la charge était trop toujours trop lourde pour l'Allemagne mais Norman et ses collègues du trésor , à la vue de la nécessité impérieuse de maintenir les USA dans le financement de la reconstruction Européenne se devaient de trouver une solution .

La question importante qui désormais se posait était : que faire si par le plus grand hasard il y avait suspension des paiements Allemands ??, ce qui ne manquait pas de venir à l'esprit d'une grande partie des spécialistes qui ne croyaient pas du tout que l'Allemagne puisse réussir de payer ce qui était demandé, et qui déciderait si un défaut apparaissait de quelles sanctions à appliquer ?

Du coté USA il était excessivement clair qu'il fallait trouver une solution pour prendre la main mais il ne fallait en aucun cas être aspiré dans les tracas Européens .Pour se faire l'attitude gouvernementale fût de trouver une solution business qui serait portée par des entreprises privées et en particulier celle qui connaissait mieux les tracas Européens : la banque Morgan.

C'est dans ce contexte éminemment politique qu'intervint une controverse illustrant particulièrement ce qui aller se passer dans les années suivante , celle de la nomination de l'Agent général aux réparations . Cette controverse mit en évidence les efforts Britanniques pour manipuler les discordes Américaines à leur avantage de façon à limiter le challenge à la prédominance en Europe de Londres et de revenir au lustre d'antan.

En filigrane l'ombre de Montagu Norman planait. Privilégiant comme à son habitude le clair obscur à la lumière il poursuivait son but qui lui était tout à fait patent : le retour de l'Angleterre au leadership d'antan

«Car tout ce dont nous avons besoin pour retrouver cette position la place de première puissance mondiale, c'est du commerce, du crédit et de la stabilité. Je crois que nous ne pourrons jamais retrouver notre position d'antan avant de les avoir rétablis en Europe» BoE, G 30/9/1922, Discours de Norman au banquet annuel des banquiers de la Cité, rapporté par le Financial Times , 21 Juillet 1922


La position officielle la plus importante parmi tous ceux qui étaient chargé de superviser le plan Dawes était l'agent général pour les réparations.

IL était à peu prés certain pour les spécialistes que d'ici à .......1929, date à laquelle les annuités normales entreraient en vigueur , l'Allemagne devrait demander à l'agent général d'arrêter les transferts des marks afin d'éviter une répétition de l'instabilité monétaire incontrolée de la période d'hyperinflation . C'était de sa responsabilité de déterminer si oui ou non les annuités futures à payer par l'Allemagne en marks , pourraient être converties en monnaies étrangères pour le transfert vers les créditeurs Alliés.

Tout le monde était d'accord sur un point il fallait qu'il fut Américain.

Dans un premier temps Col James A Logan, l'observateur non officiel du comité des réparations pour les USA apparut comme le candidat idéal, il y avait aussi Hoover qui était porté par Owen Young l'un des rédacteurs du plan Dawes. Pour les Anglais le choix entre Logan et Hoover (le futur président US en 1929) c'était choisir entre la peste et le choléra. Hoover fût rejeté aussitôt car il représentait un challenge Américain direct à la dominance financière et commerciale d'avant guerre de l'Angleterre. Logan n'était pas à proprement parler une alternative , c'était une créature d'Hoover avec un goût prononcé pour une diplomatie déviante. S'ils devaient choisir les Anglais choisiraient l'option Logan. Pour les Français et les Belges Logan n'était pas la panacée , il avait trop ouvertement critiqué la politique menée dans la Ruhr. Pour les Allemands cela pouvait passer. Début Juin 1924 Logan tenait la corde.

Mais pour Montagu Norman c'était inenvisageable , il perdrait le moyen d'imposer ses vues. Il fallait que ce fût un candidat de la banque Morgan, il avait bien plus d'emprise de ce coté la . Comme de plus la banque Morgan devait avoir la responsabilité d'émettre le prêt à 200 millions de dollars du plan Dawes il ne faisait pas beaucoup de doute pour Norman que Morgan n'aimerait pas trop se faire damner le pion sur cette question : c'était bien vu de sa part. Pour Morgan il fallait que non seulement l'agent général ait la confiance des investisseurs américains mais aussi qu'il fut quelqu'un sur lequel Morgan puisse compter en cas de défaut de l'Allemagne, ce qui ne manquerait pas d'être le cas , pour s'opposer aux vélléités Française d'aller reprendre des territoires  et puisse mettre en péril le remboursement du prêt.

Norman n'en était pas à une ruse prêt . Il fallait qu'il sonde la banque Morgan afin qu'il puisse connaitre le candidat privilégié par cette dernière. Il passerait le nom de leur favori si Norman le validait , au délégué Britannique qui siègeait à la commission des réparations. Commission qui devait nommer l'agent général ( Bennett memo, 6 Juin , 1924, Foreign Office 371, C9213/70/18, Norman to JP Morgan 4810, 6 Juin 1924, File 176/10, Thomas W Lamont Papers , , Baker Library, Harvard University)

Pour Morgan appliquant le fameux adage « qu'on n'est pas mieux servi que par soit même » Il fallait que ce fût une personne de la banque , apparut donc D Morrow . Cette candidature parassait la bonne : du coté de l'administration Coolidge (président US) cela semblait Ok , une fois Norman mis dans la confidence l'engrenage se mit en place.

Mais la partie n'était pas finie , Logan tout en ayant accepté la défaite en surface sorti un argument qui allait laisser des traces : Que l'agent des réparations soit une éminent banquier figure de Wall street ce serait jeter de l'huile sur le feu auprés des Français et surtout des Allemands qui devaient eux aussi se prononcer. 

C'est alors , comme de bien souvent , l'élection américaine vint rebattre les cartes. Il n'était pas question de laisser un progressiste comme Lafoyette voler le vote des Américains d'ascendance Allemande du Mid West en laissant supposer que Coolidge avait laissé la firme Morgan avoir un pouvoir dictatorial sur les destinées Allemandes. D'autant que l'ambassadeur en poste en Allemagne Houghton qui dina avec Coolidge le 2 juillet reprit l'argumentaire de Logan , s'en était fini de la candidature de Morrow .

Pour Norman ça en était trop , qu'il n'arrive pas à ses fins avec la mise en place de ses intrigues le mettait hors de lui , il établi un Mémorandum le 15 juillet 1924 que les partners de la banque Morgan acceptèrent afin de sévériser les conditions du prêt (British capitalism at the crossroads 1919-1932 Robert W D Boyce 56-57), c'était à prendre ou à laisser mais Norman n'apparaissait jamais en pleine lumière.

L'attitude Take it or leave it fut celle défendue pendant la conférence de Londres par T Lamont un Partner de la banque Morgan, Le 31 Juillet l'accord trouvé entre les parties émascula l'autorité de la commission des réparations tout en maintenant l'apparence de la puissance. Le Veto Britannique et Américain était plus fort que les décisions de la commision des réparations mais aussi le prêt avait la priorité sur le paiement des réparations.

Restait à trouver une solution pour l'agent général , après de nombreuses circonvolutions le choix s'arrêta sur S Parker Gilbert qui avait comme caractéristique de plaire à peu prés à tout le monde.

Derrière cet épisode à rebondissements se cache l'importance des forces en présence et des relations interpersonnelles pour arriver à des fins qui étaient antagonistes. Il met particulièrement en évidence l'importance des différentes personnalité dans ce qui mena à la crise de 1929.

Rivalité entre la banque Morgan et les politiciens de Washington, les deux voulant cependant que le plan Dawes serve comme base de renaissance économique Européen financée par les USA. La banque Morgan qui voulait prendre un avantage concurrentiel décisif et avec l'appui des Anglais elle voulait faire triompher les principes économiques par rapport aux expédients politiques . Avait elle pleinement conscience du role joué par les Anglais et en particulier par Montagu Norman afin de limiter la puissance monétaire américaine en Europe cela est moins sur .

Chez Norman la nomination d'un agent général qui fût lié à Morgan c'était influer sur le problême toujours ouvert de réarrimer le mark au gold standard , c'est-à-dire à l'or c'est-à-dire au dollar et cela voulait dire que l'Amérique domine les finances Allemandes tout en excluant la livre Sterling qui elle n'était pas arrimée à l'or.


Le Plan Dawes fut une victoire de la cause internationaliste. La probabilité que la France puisse mettre en danger la stabilité Européenne au sujet des réparations était très réduite, la confiance dans la monnaie Allemande restaurée , un volume massif de fonds étrangers , la plupart Américain et Anglais commença à entrer en Allemagne et la vie économique revint vite à la normalité.

Il y avait cependant urgence désormais à la banque d'Angleterre pour réarrimer la livre à l'or ......

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