1929 Great Depression Cold Case 6 : 1919 -1922 the times they are a changin’.

04/09/2020

Pour le moment votre soif insatiable de savoir n'a pas encore tout à fait été étanchée, et l'approche décrite comme « nouvelle » se basant sur l'adage  « à qui profite le crime » vous n'apparait pas tout à fait patente  . Un peu de patience nous y venons .

Le monde avait eu beau changer , pour les Anglais, ou devrais je dire pour les Anglais qui de prés ou de loin se préoccupaient d'économie, le seul et unique système monétaire international qui n'avait grâce à leurs yeux ne pouvait être que celui de 1913 : un standard or mondial basé sur Londres , avec une Banque d'Angleterre qui contrôlerait le système en utilisant le taux d'escompte et qui serait le gardien des pratiques financières (1929,
Great Depression Cold Case 4 : Coopération ou compétition telle est la question
?
). Il y avait par conséquent une certaine urgence à ce que l'étalon or puisse être réétabli rapidement pour l'Angleterre.

Fin 1919-1922 : La stratégie Anglaise de coopération se met en place , était elle vraiment désintéressée ????

Le pragmatisme qui caractérise si bien les sujets de la couronne Britannique , leur avait fait prendre conscience qu'il existait cependant quelques écueils jonchant le chemin menant à cet objectif ultime du retour au standard or avec comme centre névralgique Londres . Il y en avaient en particulier 2 qui étaient plus préoccupants que les autres pour nos amis Anglais .

Le premier était que les USA ne pouvaient plus être ignorés même avec toute la suffisance de l'aristocratie Britannique, damnés Yankees !! , le second était que la banque d'Angleterre n'avait plus, au sortir de la guerre à proprement parler le contrôle de l'ensemble des leviers
financiers : Shocking ! (en particulier le taux d'intérêt à court terme). La Banque d'Angleterre devait accepter le fait que le taux d'intérêt clé à court terme à Londres ne soit pas fixé par elle même mais le soit par le gouvernement avec ses bons du Trésor.

A la décharge des Anglais sur le premier point, ils n'étaient pas vraiment seuls . Les nations européennes n'étaient pas encore disposées, à l'époque, à considérer que les Etats-Unis - qui, bien que s'étant officiellement déclarés belligérants en avril 1917, n'avaient réellement
combattu sur le terrain que durant les quatre derniers mois qui précédèrent l'armistice du 11 novembre 1918 - imposent aux alliés un quelconque "leadership moral et politique , encore moins économique"


Sans vouloir paraphraser Bob Dylan dans the times they are a changin' , les temps étaient vraiment en train de changer .


Face à l'adversité cependant ,  les Anglais ont cette caractèristique peu commune parmi les peuples de bien souvent  faire corps et de serrer les rangs , et c'est avec cette philosophie « so British » que la vision de la Banque d'Angleterre : 

 que l'étalon or doive être restauré et que la Banque protège les échanges par la manipulation du taux d'escompte ,

 fût partagé par le gouvernement Britannique . La seule et véritable question était à vrai dire celle du timing de sa mise en application. La banque d'Angleterre était donc libre de continuer d'argumenter sur ce thème, et c'est d'ailleurs ce qu'elle fit en Juin 1919, quand elle proposa de lever l'embargo sur l'or et de remonter le taux d'escompte à un niveau tel soit susceptible de protéger la réserve d'or alors que la situation économique du pays ne prétait pas à ce genre de manipulations.

Petit à petit le chancelier Anglais commença à intégrer cette idée et en Octobre 1919 les premiers pas furent initiés vers la normalisation du contrôle et de la flexibilité des taux d'intérêts. Mais de retour à l'étalon or, il n'était question , les Anglais sont les Anglais !!! , qu'à une seule parité , celle connue avant la guerre celle de 1£= 4,86 $ . Le boom du restockage d'après guerre déclencha une inflation , le taux de la livre commença à tomber pour atteindre le 4 février 1920 le taux de 1£= 3,2$ , bien loin de celui qui devait annoncer le retour au standard or .Tout ceci soulignait les dangers que la Banque et les autres avocats de le stabilité avaient déjà pointés. Le 15 Avril 1920 le taux d'escompte fut porté à 7% (son plus haut niveau mis à part 1914) depuis 1873. Cela s'avéra être le pic , le boom était sur le point d'exploser (c'est le cas de le dire).



Qu'il fut sur un plan politique ou économique l'air du temps était désormais à la concertation, tout du moins de facade. Entre Janvier 1920 et Décembre 1922 , pas moins de 23 conférences au sommet entre les Français , les Anglais , les Américains les Italiens et les Belges eurent lieu . Du coté des banques centrales les discussions étaient elles aussi de mise . Montagu Norman qui avait pris les rênes de la Banque d'Angleterre voulait imprimer sa marque en réalisant la réhabilitation financière et économique de l'Europe , Il n'était pourtant pas que mu par des sentiments altruistes .

Réhabiliter financièrement l'Europe c'était à la fois un stimulus direct sur la renaissance de commerce international , cela faisait aussi partie d'une ambition plus large de voir les systèmes monétaires Européens liés ensembles dans un étalon or international . La stratégie était claire , basée sur une attitude très Victorienne. Le contrôle du crédit strict imposé par Norman déclencha une récession et quasiment 1 million de personnes furent démises de leur travail en l'espace de 12 mois. L'ensemble des financiers dont le grand prêtre était Norman et dans la plus pure tradition de la City , montrèrent aussi peu d’intérêt que possible sur le phénomène de la détresse industrielle Anglaise qui montait partout, car l'objectif était ailleurs : c'était le moyen de remettre l'Angleterre à sa place....... , la première .

Norman allait faire à sa manière , son appétence pour la manipulation et le secret allaient être des éléments majeurs des événements qui allaient s'ensuivre. (1929 , Great Depression Cold case 1 un bien curieux personnage et 1929 , Great Depression Cold case 2 un bien curieux personnage suite , LES PERSONNAGES QUI JALONNENT CE BLOG). 


Pour réétablir son lustre d'antan ,  il fallait savoir faire des sacrifices et avant que l'Angleterre ne puisse recouvrer sa force économique , La City de Londres devait regagner son ancienne position de prêteur mondial , prêteur même vers les ex ennemis. Seulement à cette condition , une prospérité et une paix durable pouvait être envisagée (Montagu Norman Andrew Boyle p124-148). Pour cela il était pourtant impératif que l'Amérique soit associée car le capital était en Amérique...... . Norman marchait sur une corde raide . 

Tenter d'associer les USA sans que ces derniers ne prennent l'avantage tout en tenant d'assurer à l'Angleterre la reprise du leadership voila quel était le vrai défi.

Dans ce contexte bien particulier d'initiation de modes coopératifs la conférence de Bruxelles en Septembre Octobre 1920 fût la première pierre à l'édifice du développement de la coopération internationale et en particulier en ce qui concerne les affaires monétaires . Ce fût la première manifestation d'activité de la nouvelle société des nations, elle avait pour objectif d'étudier et de trouver des solutions à « la crise financière ».

Norman avait cependant bien perçu que l'Amérique ne parlait pas d'une seule et même voix . Certes du coté de la Fed de New York Strong partageait la même vision que la sienne mais les USA avaient drastiquement réduit , puis stoppé , les prêts officiels vers les alliés Européens juste après l'armistice, ils avaient rejettés à la fois le traité de Versailles et leur participation à la société des Nations et qalors qu'ils insistaient sur le règlement des dettes de guerre , avait compliqué leur repaiement en augmentant les barrières douanières.

Cette dualité entre le politique et l'économique a toujours d'ailleurs été mis en évidence comme explication de l'ensemble des maux des années 1920's . En 1944 Norman reçu d'un vieil ami Russell C. Leffingwell (de la Banque Morgan New York) ces quelques lignes :

When history comes to be written from a point of vantage somewhat remote from currency controversies, it will I think be judged that your leadership in monetary reconstruction gave the world the best chance it had after the First World War for peace and law and order. . . . I think you did a great job and . . . it might have had ultimate and durable success if the politicians had done a better job. (Leffingwell to Norman, copy, 19 April 1944, 1030, Box 6, Folder 133, Leffingwell Papers, Yale University Library, New Haven, Conn)

Difficile de louper l'évaluation postérieure apologétique d'un banquier connu envers le plus fameux d'entre tous . C'était comme si les politiciens avaient été responsables seuls de l'échec de la reconstruction financière et économique des années 20. L'impression est d'ailleurs renforcée quand on lit la réponse de Norman à cette lettre : 

 « What makes me despondent is the failure of the politicians to do their part and to give a sense of political security. » Norman to Leffingwell, Isle of Man, 6 June 1944 ibid

Norman a toujours eu cette certitude chevillée au corps : il fallait faire avec le politique mais ce serait mieux si on pouvait faire sans, d'où une série de stratagèmes les plus retords pour le contourner , sa personnalité au demeurant lui faisant opter bien évidement pour la « cloak and dagger » attitude

S'ensuivit une visite de Norman à New York en Aout Septembre 1921 , sa stratégie passait par une « coopération » avec la Fed . Cela n'était pas pour lui un moyen d'y établir des contacts , il connaissait déjà fort bien les USA. Mais bien pour cimenter un partenariat entre 2 banquiers centraux : Lui et Benjamin Strong de la Fed de NY. Les points qu'il avait en tête étaient définis :

  • Aller plus loin dans la relation entre la Banque d'Angleterre et le Board de la Fed et des banques
  • Promotion des actions communes entre les banques de la Federal Reserve et les autres banques centrales
  • Intéresser l'Amerique aux besoins financier de l'Europe de l'Est

Cette coopération avec la Fed seule en effet n'était pas suffisante à ses yeux . Norman avait bien perçu la subtilité de la différence entre l'Amérique et l'Angleterre. L'accent de la visite n'avait donc pas été mis forcement sur New York , il connaissait trop bien cette Amérique pour sous estimer l'importance du Board de la Reserve Federale à Washington ou de la dépendance des banquiers de New York sur un réseau plus large d'opinion . Les prochaines étapes dans le champ international devant être

  • La reconstruction de l'Europe
  • Le mouvement vers la restauration d'un standard or international
  • L'établissement de banques centrales nouvelles ou réformées
  • La propagation d'une doctrine qui ne devait pas se satisfaire les banquiers centraux mondiaux à manager un standard or restauré , mais aussi à lier l'ensemble de ces derniers dans une caste professionnelle de support mutuel , un véritable club à l'Anglaise.

The Bank of England Sayers P153-157

C'est à ce moment précis où l'un des événements les plus important de l'entre 2 guerres eut lieu .  Montagu Norman comme bien souvent était dans l'ombre bien qu'il ait joué pourtant un rôle prédominant.

La conférence de Gênes (10 Avril - 19 Mai 1922) : Le Game Changer a suivre


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